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  • Photo du rédacteurEwa Staub

"Mes autres parents"


Le nouvel-an s'est rallongé chez nous jusqu'au soir du 2 janvier. On était un peu sur la fin et du coup on s'est dit qu'il n'y a rien de tel que de commencer une nouvelle année avec un vieux film qu'on aime. Et on a choisi le préféré de Vanessa - Coraline.

Vanessa adore tout ce qui est mystère, message caché et charade, son papa regarde plutôt ce qui se joue entre les adultes et s'ils peuvent vivre sans antidépresseurs, et moi, évidemment, je regardais ce que vivait les enfants. Coraline, Wyborne* et les trois petits fantômes. En gros - nous avons regardé très attentivement et longuement discuté après. Ce qui fait que je pourrais mettre ici une quantité de spoilers complétement indécente, mais non. (Mais, sachez-le, les spoilers sont au chaud à dispo :-) ).


Ici, contentons nous de regarder ce qui se joue entre Coraline et ses parents, Mel et Charles.


Premièrement, Coraline est en colère. Et elle a toutes les raisons pour l'être: on l'a arrachée de son milieu, séparée de ses amis, parachutée dans une maison vieille, laide et habitée par les gens plus que bizarres. Ses parents n'ont pas une minute pour elle, lui font clairement comprendre qu'elle dérange et tout ce qu'on attend d'elle est qu'elle s'occupe sans se salir (donc l'interdiction du jardinage). En plus, la nourriture est abjecte et sa maman veut l'affubler d'une horrible uniforme scolaire couleur souris morte. C'est contrariant.

Qui ne serait donc tenté, à sa place, de chercher un endroit, réel ou imaginaire, où c'est un brin moins pénible. Moi, personnellement - si.


(Et d'ailleurs, je l'ai fait... Quand j'avais l'âge de Coraline, je trouvais assez agaçant de vivre dans un quartier des locatifs gris de la Pologne de l'époque, donc du monde de George Orwell. J'ai crée une porte magique dans le mur de la cave de l'immeuble, où, à travers un jardin tropical, je passais dans mon monde à moi. La création de ce monde avait des conséquences réelles et très concrètes, que je raconterai peut être. Une fois. Quelque part.)


Coraline trouve un monde ou elle n'est pas de trop. Tout au contraire. Elle est nécessaire, c'est elle qui devient la source du bonheur pour les parents et autres habitants de ce monde alternatif. Enfin, on prend soin d'elle! On la nourrit! On lui donne de l'amour gratuit!


Oh, wait. Dans ce monde, où tout est tellement merveilleux, l'amour n'est pas gratuit. C'est une transaction bien lourde. Ce n'est pas ce que Coraline recherchait. Et elle se rend facilement compte que, en réalité, les mots gentils, la nourriture exquise, la belle chambre, les habits colorés et les époustouflants spectacles ne valent rien pour elle, si tout cela est détaché de l'amour authentique de ses vrais parents. Elle laisse tomber le clinquant sans aucun regret pour aller vers le vrai.


Encore une fois: l'enfant cherche l'amour et il le détecte à travers la gentillesse. Si la gentillesse est absente (pour un million de bonnes raisons), l'enfant aura de la peine pour trouver le chemin vers l'amour. Et il peut se perdre. Heureusement, il y a un deuxième repère: l'authenticité.


Si les vrais parents de Coraline se sentaient coupables d'être agacés contre elle et s'ils cherchaient à masquer leur agacement par une fausse gaité et douceur, il serait beaucoup plus difficile pour la fillette de distinguer entre sa vrai (fausse) maman et sa fausse (fausse) maman. Heureusement, Mel (tout en restant enfermée dans ses problématiques symbolisées par les boules de neige qu'elle collectionnait) sait garder la posture qu'on peut traduire ainsi:

"Ma fille, je vis un stress massif, tout m'énerve, j'ai mal au cou (minerve), je ne peux penser en ce moment à autre chose que mon travail - MAIS CE N'EST PAS DE TA FAUTE. Ce n'est pas à toi de me remplir de bonheur en était une fille exemplaire - c'est à moi de finir mon job pour être disponible pour la merveilleuse fille que tu es".


Le film est beaucoup plus riche que ça, mais c'est à cette conclusion que je voulais arriver:

Parfois, emprisonnés dans nos problématiques, nous reportons notre mal-être sur nos enfants. A la place de constater que nous sommes épuisés le soir par la journée de travail, nous faisons comme si c'était notre enfant qui nous rendait malheureux, puisqu'il n'a pas fait suffisamment bien ses devoirs. Et du coup c'est à nos petits de porter sur leurs épaules notre stress à nous et de distinguer entre le juste et le faux - alors qu'ils n'en ont aucunement les moyens cognitifs de le faire.


Restons très attentifs à cela - nos enfants ont besoin de notre authenticité pour ne pas aller vers les parents imaginaires, et s'ils y vont, de ne pas rester emprisonnés vers eux pour toujours. Comme des petits fantômes tout gris.

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*Quelque chose (de plus que le spoiler que je ne mettrai pas) me titillait dans ce prénom. C'est au bout de deux semaines que je l'ai enfin lu dans ma langue maternelle et j'ai compris pourquoi le mot me semblait familier ;)

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