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  • Photo du rédacteurEwa Staub

Pourquoi l'on entend autre chose que celle qui est dite?...


Parce que, d'un côté, et heureusement, nous sommes très doués et nous ne nous faisons pas facilement avoir par des faux messages.

Mais aussi, d'un autre côté, et malheureusement, nous sommes conditionnés par les messages que nous avons entendus depuis tout petits, qui sont restés dans nos têtes et dans nos cœurs et, quand nous sommes grands, nous peinons à les entendre autrement que pendant notre enfance. Regardons juste ce qu'on peut faire avec une simple injonction de se laver les mains :-)

Un petit enfant entend de la part de son parent « lave-toi les mains avant de te mettre à table ». Pour l’adulte, cette phrase est factuelle. L'adulte est rarement en phase avec la charge émotionnelle qu’elle contient.

L’enfant – si. L’enfant est toujours émotionnellement en phase avec ses parents et avec leur manière de dire les choses. Par conséquent, il entendra moins la phrase « lave-toi les mains » que ce l’adulte n’est pas conscient de dire. Et cela varie selon l’adulte. Quelques exemples :

A: Le message du parent modèle (qui, on est bien d'accord, n'existe pas - personne n'est parfait à 100%, et heureusement) : « Mon petit bout, nous allons manger. Se mettre à table ensemble c'est chouette. Nous allons partager de la nourriture et de l'amour, parler des choses drôles et des choses importantes, nous écouter les uns les autres. Ce repas est préparé avec amour et pour respecter cela – et accessoirement éviter les microbes – nous allons nous laver les mains ensemble. Je suis heureux d’être ton parent. »


Si l'enfant comprend cela, naturellement il gambadera joyeusement vers la salle des bains. Dans l’idéal, l’adulte se lavera les mains en même temps et l’enfant imitera les gestes des mains adultes et leur incroyable motricité fine qui fait passer le savon dans tous les recoins. La remarque « lave-toi les mains » sera enregistrée comme un élément du monde où il fait bon vivre et une expression d’amour.

B: Le message du parent stressé (l’adulte préoccupé, par exemple, par la charge de travail qui le submerge et qui est son seul moyen de subvenir aux besoins de la famille) : «Cher enfant, nous allons manger. Pendant le repas je serai distrait et peu disponible pour toi et ce que tu auras envie de me raconter. En fait, j’aurais préféré de sauter ce repas et continuer de travailler. Sois donc gentil, fais-toi tout petit et lave-toi les mains, sans me faire perdre les restes de ma patience. En réalité, je m’en fous un peu de ton hygiène, mais puisque je suis contraint de jouer le jeu du repas, je vais aussi jouer le jeu des des mains. »

L’enfant, imbibé de ce message jamais dit à voix haute, pensera (sans mots non plus) : « La personne que j’aime le plus au monde me trouve encombrant. »

Il choisira soit de se faire tout petit, soit de réclamer un peu plus de place, ce qui amènera au conflit. Dans les deux cas, l’auto estime de l’enfant diminuera. Mais - au bout du compte - il se lavera les mains.

C: Le message parent "caché" (l’adulte incapable de s’aimer soi-même) :

« Puisque tu es mon enfant, et moi je n’ai aucune valeur, je ne peux pas te valoriser. Je vois bien que tu me regardes, tu me souris et tu attends de moi que je te remplisse d’amour que moi-même je n’ai jamais reçu. Ton sourire plein d’espoir me met face à mon incapacité d’y répondre. Cela rend mon vide intérieur encore plus insupportable et me rend agressif. Mais je ne peux raisonnablement pas t’agresser sans raison. Alors je vais faire comme si tu avais fait quelque chose qui justifierait mon agressivité : je vais te dire que tes mains sont sales et que tu es un souillon trop stupide pour penser toi-même de te les laver et ajouter « qu’est-ce que j’ai fait pour mériter un sale gosse pareil ». Et quand tu mangeras, triste et résigné, ma colère, irritation et agressivité seront moins absurdes que si tu étais un sage enfant joyeux. »

On imagine ce qui se passe dans le cœur de l'enfant.

Il existe une multitude de variantes de parents : parent coupable, parent honteux, parent immature, parent tout-puissant et les différents mélanges. On s’y penchera dans un autre texte.

La même phrase peut devenir, selon le non-verbal qui l'accompagne, aussi bien l’expression d’amour que de rejet.

Cette perception, qui s’imprime en chacun de nous pendant l’enfance, sera notre clé d’interprétation pour ce que nous entendrons plus tard. A l’école, au travail, de la part des amis et de la part du conjoint. L’enfant A qui aura grandi avec une bonne auto-estime, saura mieux déchiffrer le vrai sens des remarques venant de qui que ce soit. Pour l’enfant C, toute remarque, constructive ou destructrice, sera une preuve en plus de sa non-valeur et une raison de se ratatiner encore et encore.


On peut aussi regarder ce qui se passe pour nos trois enfants à l'adolescence et de quelle manière ce qu'ils entendent se fait filtrer de plus en plus par leurs expériences du passé:


(Sans oublier que ce que l’on décrit ici est très, très sommaire.)

L’adolescent A : est nourri d’amour que ses parents ont pu lui communiquer ouvertement. Autrement dit, il n’a pas peur de ne pas être aimé. Il se sent accepté, c’est-à-dire qu'il sait que personne ne fait jamais tout juste et que l’on n’en meurt pas. Que les enseignants peuvent être aussi bien justes qu’injustes, que les copains peuvent être bienveillants ou malveillants, les adultes dans la rue peuvent répondre ou ne pas répondre à un gentil «bonjour » et que le monde ne s'écroulera pas. Puisqu’il est accueilli par ses parents avec ses acquis et avec ce qu’il lui reste à travailler. Quand il entendra « tu es moche, tu es bête, on veut pas de toi dans notre bande », il s’en remettra sans trop de dégâts, parce qu’il saura que c’est la bande en question qui dysfonctionne. Quand il entendra « tu ne sais pas mettre ton pied dominant où il faut sur ton skate », ou « ton gag ne me fait pas rire », il sera tout content et capable de remercier la personne pour l’opportunité d’amélioration qui lui est offerte.

L’adolescent B : l’adolescent qui a grandi dans un monde sans dimensions.

« Pas maintenant. » « On verra ça plus tard. » « Va jouer dans ta chambre. » « Vite, tu vas nous mettre en retard. » « Quoi, t’es pas encore prêt ? » « Mets-moi ça dans ta chambre. »

L’adolescent dont l’enfance a été construite par le parent stressé a le choix entre deux voies, qui dépendent un peu du fait si le parent stressé a une dominante plus coupable ou plus autoritaire.

L’adolescent face au parent stressé / autoritaire optera pour la voie de soumission. Il se fera tout petit. Il ne dérangera pas. Adulte, il commencera ses conversations téléphoniques par « pardonnez-moi de vous déranger ». Systématiquement envoyé jouer dans sa chambre, il créera son monde à lui. Mais, au départ, il se tiendra toujours prêt à le quitter pour ne pas décevoir encore plus son parent stressé, s’il est trop lent. Avec le temps, son monde imaginaire l’aspirera toujours plus et il deviendra insensible à des cris impatients du parent. Il les prendra comme une fatalité contre laquelle il ne peut rien. Il se peut que physiquement il reste plutôt petit et maigrichon, avec les épaules rentrées et les coudes près du corps, pour ne pas prendre trop de place. Coincé pendant l’enfance entre «dépêche-toi » et « dérange pas », il développera au départ un système d’identités à plusieurs vitesses et à plusieurs facettes, qui vont lui servir plus tard face à des différents interlocuteurs ; cependant il ne pourra s’affirmer devant aucun. Les remarques qu’il va entendre ne le construiront pas, elles vont juste servir de critère pour le choix du masque à mettre.

L’adolescent face au parent stressé / coupable prendra plutôt la voie de la révolte. Active ou passive. Ce qui revient un peu au même, sauf que dans la version active c’est l’adolescent, et dans la passive c’est le parent qui hurle plus.

Cet adolescent-là a entendu les mêmes injonctions que l’enfant du parent stressé / autoritaire. Mais il a senti que le parent ne se sent pas tout à fait légitime à les émettre. Ses réactions ont été différentes. Quand il entendait les « pas maintenant », « va jouer dans ta chambre » etc., prononcés avec une petite note de supplication, son système de base lui soufflait « si tu t’effaces maintenant, tu disparaîtras à tout jamais ; tiens bon ! ». Alors cet enfant-là hurlait, sortait tous les jouets de la chambre, trainait quand il fallait se dépêcher et tapait du pied d’impatience quand on lui demandait de revenir plus tard. Bref, il luttait pour ne pas disparaître.

A l’adolescence, les deux (l’actif et le passif), auront beaucoup de peine à comprendre que le parent puisse leur communiquer quoi que ce soit pour leur bien, tellement le sentiment de ne pas avoir de l’importance sera ancré.

L’enfant du parent stressé / coupable /en version active, quand il entendra « dépêche-toi, tu seras en retard pour l’école » , ira immédiatement vers la confrontation, en ripostant par exemple : « de toute façon l’école c’est fait pour des ratés comme toi ».

En version passive, la même remarque fera que l’ado en question ralentira (souvent sans en être conscient) encore dix fois plus, quitte à saboter une épreuve importante.

Les enfants du parent stressé / coupable auront souvent tendance à prendre de la place physiquement, c’est-à-dire, tout conditionnement génétique respecté, à être plutôt forts. En version passive souvent avec la rétention d’eau dans le bas du corps.


L’adolescent C: Pour lui, l'aventure sera la plus intense. Il serait peut-être mieux de lui consacrer une note à part, obligatoirement avec le happy end :-)

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