Je vais vous raconter une histoire sans queue ni tête. Aussi brièvement que possible.
Elle ne ressemblera pas à une histoire de Noël, mais les apparences sont trompeuses.
Introduction : Je suis une trouillarde. Un archétype de la lâcheté. Je l’ai toujours été. Dès que je vois un trou de souris, je m’y cache immédiatement et il me faut une motivation énorme pour en sortir. L’idée que quelqu’un puisse se moquer de moi ou me manquer de respect est une vraie torture. En bref - je n’ai aucune envie d’écrire ce texte ni de le poster où que ce soit, et je transpire à l’idée de passer pour une folle. Mais toutes les autres options sont pires. Au fond, j’espère que personne ne me lira...
Voici donc une histoire sans queue ni tête.
Il y a longtemps, quand mon fils avait la moitié de son âge actuel, et ma principale aspiration était d’avoir beaucoup d’amies et de boire beaucoup de cafés avec elles (et peut-être aussi d’améliorer ma situation socio-économique en devenant kinésiologue), nous sommes allés tous les deux au Musée suisse des Transports de Lucerne. La première attraction qui nous a attirés était le simulateur de vol. Programmé pour que même un enfant de cinq ans puisse s’amuser à le piloter.
Nous sommes entrés joyeusement dans le simulateur. Le loquet a claqué et la piste d’envol à l’écran s’est illuminée. Quand on a décollé, ma gorge s’est bizarrement serrée. Tandis que mon fils pilotait, je me laissais submerger par une attaque de panique. À un moment donné, cette panique m’a fait que prendre les commandes de l’avion et ... eh bien, l’avion s’est majestueusement fracassé. En sortant, j’ai essuyé le regard de mon fils, lourd de reproches, et celui des gens dehors, plein de pitié. Ma foi.
Dans le train, en rentrant à la maison, j’ai reçu le coup de fil de ma maman, qui m’a appris qu’un avion s’est écrasé au-dessus de Smolensk, en Russie, avec, à son bord l’ensemble du gouvernement polonais. Tous ces événements ont eu lieu le 10 avril 2010. (Pour ceux qui veulent en savoir plus : cherchez sur Google « Massacre de Katyn »)
À l’époque, ma conscience et mes connaissances politiques étaient au niveau du ver de terre. Forte de mon ignorance, je ne me suis pas laissé troubler. J’ai juste commenté les propos de ma maman, ironisant sur le fait que des personnes se déplaçant pour commémorer un massacre ont eux-mêmes péri et que de plus, je venais moi-même de crasher un avion. J’avais déjà oublié ma crise de panique.
Et puis je suis devenue kinésiologue. Je me suis frayé un chemin à travers diverses formations, rituels et protocoles. J’ai approfondi d’autres connaissances et me suis intéressée à la Kabbale, à l’alchimie, aux aspects oubliés du Moyen âge, et enfin à l’histoire et à la politique ancienne et moderne. Au terme de ce parcours, je suis douloureusement arrivée à la conclusion qu’en réalité, il n’y a que deux voies possibles. La première voie consiste à errer comme un enfant ivre dans le brouillard, consommateur de divertissement, en quête d’acceptation sociale et de confort financier, pour enfin se décomposer discrètement quelque part.
La deuxième voie est celle de la Sainte Église catholique universelle et de ses sacrements.
À partir de ce moment-là, mes anciennes aspirations ont nettement perdu de leur importance.
Exactement neuf ans plus tard, le 10 avril 2019, je traversais les forêts de ma région en voiture. La radio était allumée. Une voix enthousiaste proclamait que ce jour était absolument extraordinaire et historique. Les scientifiques de l’EHT (Event Horizon Telescope) avaient réussi, à travers la mise en commun d’un réseau de neuf radiotélescopes disséminés dans le monde, à révéler la toute première image d’un trou noir. En écoutant cette expression de bonheur débordant, j’ai senti revenir mon attaque de panique d’il y a neuf ans.
Je me suis arrêtée pour mettre de l’ordre dans mes pensées. En bref, il s’agissait de composer avec une petite voix à l’arrière de mon crâne, me disant clairement que le trou noir, cette quintessence de l’obscurité insatiable qui se nourrit de toute lumière et pour l’éternité, est la parfaite matérialisation du concept de péché mortel.
Assise dans ma voiture, je me suis demandé si entre ces deux événements, le crash d’avion et l’image du trou noir, il pouvait y avoir d’autres liens que la date. Si nous prenons le ciel comme dénominateur commun, alors nous voyons que 5 jours après le 10 avril 2010, un autre événement a eu lieu : les cendres de l’éruption volcanique de l’Eyjafjöll atteignaient l’Europe, entraînant un arrêt durable du trafic aérien. Je me suis donc dit : « Voyons donc si quelque chose se passe dans 5 jours ».
5 jours plus tard, le 15 avril 2019, la cathédrale Notre-Dame de Paris était en flammes.
Ce feu a été l’un des principaux sujets de nos conversations à Częstochowa, lieu de pèlerinage en Pologne, où nous sommes allés en famille pour les fêtes de Pâques.
La question qui en découlait directement était de savoir si ces fêtes de Pâques ne seraient pas nos dernières.
Ainsi, lorsqu’à la fin du mois de février de cette année 2020, la hiérarchie de l’église a annoncé que l’eau bénite ne devrait plus remplir les bénitiers de nos églises et que globalement rentrer dans une église était fortement déconseillé, ma tristesse était beaucoup plus grande que ma surprise. J’imaginais déjà que Noël nous serait volé d’une manière ou d’une autre.
(Je n’arrête pas de penser à ce courageux aumônier des sapeurs-pompiers de Paris, qui a sorti des flammes de la cathédrale la couronne d’épines du Christ qui s’y trouvait et de mettre en parallèle la question du pourquoi quelqu’un a choisi, pour nous terroriser, ce mal nommé corona - virus.)
Aujourd’hui, le 24 décembre 2020, nous sommes des gens résignés, sans visage, qui ont renoncé à se rendre dans les églises, tremper les doigts dans le bénitier et faire le signe de croix. Par contre, l’ensemble de ceux qui se rendent dans les temples de la consommation, de la production ou de l’administration, se « purifient » les mains avec une substance chimique industrielle, pour ensuite les joindre en un « amen ». Plus tragique encore, ils donnent l’ordre à leurs enfants de faire pareil.
Nous courons désespérément derrière l’illusion d’un sentiment de sécurité.
Nous passons des heures à analyser le degré de méchanceté de ce virus et les dégâts psychologiques, sociaux et économiques, de ce mal microscopique et insaisissable, sur lequel nous entendons tout et son contraire. Nous ressemblons à des vers terrifiés gigotant sous une pierre que quelqu’un a déplacée subitement.
Je suppose qu’une fois encore il n’y a que deux voies possibles qui s’offrent à nous. La première est de continuer à se focaliser sur le quotidien comme un taureau se focalise sur la cape rouge du matador. Ainsi, nous serons des citoyens obéissants et socialement acceptables, qui se plient à toutes les contraintes édictées au nom de la lutte contre la pandémie, subissant silencieusement la catastrophe financière annoncée, et finalement tombant malades de stress et d’épuisement.
La deuxième voie est beaucoup plus difficile. C’est la conscience que le Christ, le Sauveur, naîtra aujourd’hui. Réellement. Que ce n’est pas une tradition vide, une vue de l’esprit, une jolie métaphore. Et que notre job est de faire en sorte que Lui, le Sauveur, puisse se sentir dans nos cœurs et dans nos familles – chez Lui. À la maison.
S’il s’agissait simplement d’une métaphore, les forces des ténèbres n’engageraient pas de tels moyens pour nous en distraire et nous faire regarder la cape du matador.
Je ne sais pas à quoi ressembleront les prochaines fêtes de Pâques. Il se peut que beaucoup dépende de ce vers quoi nous tournerons nos yeux, nos cœurs et nos âmes aujourd’hui et demain.
Dieu naît dans la peau d’un enfant fragile, dans les bras de sa douce Mère. Nous avons le choix : soit nous le protégerons avec Marie et Joseph, soit nous ne sommes rien.
Avec toutes les bénédictions pour la naissance du Sauveur.
(Le tableau peint par Agnieszka Sklodkowska www.slodkowska.pl )
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